Comprendre son enfant par ses dessins

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Crédit photo : gpointstudio
  • joue et décharge ses pulsions. Ses pulsions sont normales. Le dessin permet de les exprimer symboliquement plutôt que physiquement.
  • prend connaissance du monde qui l’entoure, 
  • communique ; il dessine avant même de savoir parler ou écrire, 
  • se soigne, en expérimentant symboliquement les questions de sa vie. 

Ainsi le dessin l’aide à se structurer et traduit son monde émotionnel intérieur. Quand il dessine un bonhomme ou un arbre, c’est lui-même qu’il dessine. Une maison est le reflet de sa famille (réelle ou idéale). Chaque détail a son importance et montre comment il se voit, comment il évolue, comment il se situe par rapport aux autres. Lorsque l’enfant donne son dessin à l’adulte, il se livre tout entier. Ce qui importe n’est pas la valeur esthétique du dessin, mais plutôt ce qu’il exprime à travers le langage symbolique des formes et des couleurs. Il peut indiquer le vécu, l’équilibre affectif ou le développement psychique de l’enfant.

Je vais vous donner quelques clés de lecture du dessin de votre enfant. Attention toutefois à ne pas en faire une interprétation figée et rigide. Le dessin est fonction de l’âge de l’enfant et de son processus d’évolution psychique. Ce qui peut être normal à un certain âge, peut nous interroger à un autre âge. Il est par exemple normal que les personnages soient peu articulés avant l’âge de 5 ans. Entre 7 et 12 ans, le dessin se précise progressivement, de plus en plus fidèle à la réalité, avec un effort pour respecter les couleurs, les distances et les dimensions. Il perd en fantaisie et devient plus formel. De même, il est normal que certaines tensions se manifestent dans son dessin dans la phase de l’Œdipe, pour résoudre symboliquement son besoin de “combattre” le parent de même sexe et exprimer son “amour” pour le parent de sexe opposé.

Le dessin est le théâtre intérieur de l’enfant à un moment donné. Il est dangereux de conclure à partir d’un seul dessin. L’analyse d’une série de dessins permet de déceler les invariants et les changements, les questions récurrentes et le cheminement vers la résolution de celles-ci. Ainsi il peut être utile de dater les dessins de l’enfant et d’inscrire au dos les commentaires qu’il a fait sur son propre dessin pour aider à l’analyse. 

Par ailleurs, l’adulte peut utiliser l’analyse des dessins pour mieux comprendre son enfant mais il ne doit pas intervenir dans ce territoire intime. Quelles que soient les pulsions exprimées, elles sont vitales et demandent à être libérées. L’enfant peut dessiner l’ange et le démon qu’il ressent en lui-même, pour comprendre et accepter ses sentiments ambivalents et ainsi se construire une personnalité cohérente. Par exemple, à la naissance d’un petit frère ou d’une petite sœur, il est normal de vouloir faire “disparaître” le gêneur. Dans le dessin, on peut observer un oubli d’y faire figurer le nouveau né, ou des excuses comme “il n’y avait pas la place”, ou le nouveau-né est placé tout seul à l’écart ou au verso de la feuille, ou bien l’enfant prend la place du nouveau né dans le berceau. Cela n’a rien d’inquiétant mais montre simplement la crainte de ne plus être câliné autant qu’un bébé. C’est pour lui une façon d’évacuer la situation douloureuse, en essayant symboliquement de la maîtriser. A vous, ensuite, de mettre des mots sur ses angoisses et de le rassurer sur sa place dans la famille et dans votre cœur.

Chacun prend possession de l’espace graphique comme il prend possession de l’espace autour de soi. Certaines personnes aiment prendre toute la place, quand d’autres n’osent pas, et mesurent ou inhibent leurs gestes. 

Le schéma qui suit indique l’utilisation symbolique de l’espace. Une fois de plus, cela n’a pas force de loi.

Par exemple, un dessin coller à gauche peut indiquer une recherche de sécurisation maternelle (excessive ou normale selon l’âge). La partie droite renseigne sur la relation au père et sur la relation à la vie en général. Le remplissage systématique peut être l’expression d’une tension. Il a un effet rassurant. Prendre possession du vide donne une sensation de maîtrise du monde.

Chaque couleur a un contenu affectif et émotionnel. Si on peut dégager des tendances universelles, il faut toutefois rester prudent sur l’interprétation des couleurs qui est multiple et propre à chacun. La couleur et la forme participent souvent à un ensemble plus vaste d’indications. 

Une dominante de couleur chaude (rouge, orange, jaune) peut indiquer un tempérament plutôt extraverti alors qu’une utilisation privilégiée de couleur froide (bleu, vert, violet) peut montrer une tendance à l’introversion ou à la timidité. Un manque de couleur peut être le signe d’un vide affectif ou d’un problème d’expression de l’affectivité. 

  • Rouge : l’action, la virilité, la puissance des désirs, l’agressivité ou le besoin de mouvement;
  • Bleu : la sensibilité, l’émotion, l’intériorisation, la paix, la tranquillité, le repos, la passivité ou la résignation ;
  • Violet : le désir d’autre chose, le mysticisme, l’anxiété ou les tensions contradictoires ;
  • Jaune : la lumière, la joie, l’optimisme, le rayonnement, l’ouverture, le désir de participation, la volonté d’aller de l’avant ou le besoin de libérer des tensions intérieures ;
  • Vert : l’estime de soi, le besoin d’être reconnu et considéré par les autres, le désir de communication, la persévérance, des attitudes de résistance ou d’opposition, ou la jouissance matérielle ;
  • Orange : la vitalité, l’extraversion, le désir de réussite, la joie, la gaieté, le dynamisme, l’excitation, l’agitation, le désir de plaire ou d’être remarqué ;
  • Rose : la paix, l’équilibre, l’harmonie, l’affectivité dénuée de passion, la tendresse ou la douceur ;
  • Noir : la tristesse, le désespoir, l’anxiété, l’angoisse, la mort ou le manque d’espoir ;
  • Gris : des difficultés d’expression des sentiments ou de passer à l’acte ;
  • Blanc : la tendance à se réfugier dans le rêve, l’idéal, l’intériorisation ou la réflexion.

Souvenez-vous que l’interprétation des couleurs ne doit pas être systématisée. Et puis l’enfant avait-il vraiment sous la main un choix de couleur au moment où il dessinait ? Un dessin à dominante noire n’est pas dramatique. Une série de dessins très sombres pose question et mérite votre attention. 

Le test du dessin de l’arbre est utilisé en psychologie, dans l’évaluation intellectuelle et affective, en orientation professionnelle et en psychiatrie depuis 1928. 

La taille et la position de l’arbre indiquent comment la personne se situe dans la vie (cf schéma de l’utilisation symbolique de l’espace). Les arbres joyeux sont plus grands que les autres. Les arbres effrayés ont des branches chaotiques avec des traits dans tous sens. Un arbre souffrant s’incline et penche vers le bas. Le tronc représente la force et la stabilité, l’axe central de la personnalité, la façon de prendre sa place parmi les autres, le rapport avec le quotidien et le concret. La couronne de l’arbre montre l’habileté à s’exprimer et la possibilité de créer des idées. Elle indique l’ampleur et la qualité du raisonnement et de la pensée. Les racines indiquent les pulsions secrètes et inconscientes, les questions non formulées, la curiosité plus ou moins obsédante, la recherche de stabilité, de sécurité ou le besoin de savoir.

Ce test est une méthode d’évaluation psychique parmi tant d’autres. Tous les dessins peuvent être sujet à interprétation, à condition d’être réalisés avec suffisamment de lâcher-prise, et interprétés avec souplesse.

Le dessin est un moyen privilégié d’entrer en contact avec notre enfant ou notre âme d’enfant !

Auprès de votre enfant, ce travail  d’exploration, à travers le dessin, permettra de clarifier ce qui vous échappait et ainsi mieux communiquer avec lui pour le guider dans son évolution personnelle.

Mais l’art thérapie analytique aide aussi à comprendre le langage symbolique des dessins, quel que soit l’âge du dessinateur. Chaque dessin est l’occasion d’explorer la part inconnue de soi, pour mieux comprendre ce qui nous trouble, nous émeut, nous agite, nous bloque, nous dérange. Alors, que ce soit pour votre enfant ou pour vous-même, soyez curieux de ce qui s’exprime à travers vos dessins sans que vous le sachiez !

Cet article est grandement inspiré du livre Comprendre votre enfant par ses dessins, de Sylvie Chermet-Carroy, que je remercie pour la qualité de son ouvrage, devenu une référence pour aider dans l’interprétation du dessin de l’enfant (et de l’adulte).